La réponse de Mgr Bruno Feillet
C’est LA bonne question. Depuis les origines, les chrétiens ont reconnu en Marie non seulement le modèle du disciple mais plus encore, le modèle de toute l’Eglise. Plus on fréquente la Mère du Seigneur et plus elle nous conduit à lui par son attitude, ses actes et ses paroles.
Marie, modèle du disciple du Christ
Dans la tradition catholique, la dévotion et la théologie mariales trouvent leur pleine justification dans l’expression suivante : «Ne rien dire de la Vierge Marie sinon pour mieux dire du Christ». En effet, c’est pour son fils et par son fils qu’elle a été, selon les termes de l’ange, «comblée de grâce». Oublier qu’elle est la mère du Seigneur serait la séparer de la source qui a fait d’elle la Reine des cieux, la mère des apôtres et d’abord et avant tout la mère de Dieu.
La vie de Marie, jalons essentiels de la vie chrétienne
A vrai dire, si Marie peut nous aider à mieux connaître Jésus, c’est parce qu’elle est le modèle du disciple, dans toutes les étapes de sa vie.
- Elle accueille le Christ sans réserve, dans sa chair, et devient servante de Dieu. «Je suis la servante du Seigneur, qu’il me soit fait selon ta parole» répond-elle à la demande de l’ange (Luc 1, 38).
- La visite à sa cousine Elisabeth ne relève pas de la seule curiosité qui voudrait vérifier la parole de l’ange. Elle a déjà dit pleinement oui. Elle souhaite sans doute partager sa joie mais plus encore rendre service à une femme âgée en fin de grossesse. Le signe évident que la grâce de Dieu est passée dans une vie est le surcroît de charité qui se manifeste.
- Elle accepte de ne pas toujours comprendre ce que Jésus a dit ou fait, mais elle garde et médite les événements dans son cœur.
- Avec Joseph, elle va protéger Jésus, l’élever mais aussi se laisser bousculer par lui. Jésus, tout jeune adolescent, était resté au temple de Jérusalem pour discuter avec les docteurs de la loi. Marie, qui l’a cherché trois jours avec Joseph, angoissée, lui demande les raisons de son geste. Et lorsque Jésus lui répond «je dois être dans la maison de mon Père» (Luc 2, 49), elle réagit «en gardant fidèlement toutes ces choses dans son cœur» (Luc 2, 51).
- Elle conduit d’autres personnes à écouter Jésus. A Cana, c’est elle qui invite les serviteurs du repas à «faire tout ce que son fils leur dira» (Jean 2, 5). Elle les introduit dans la confiance et la foi en la parole de son fils.
- Elle accompagne le Christ jusque dans sa passion. Marie est présente au pied de la croix où Jésus lui offre le disciple qu’il aimait en lui demandant d’être sa mère et s’adresse au disciple en lui demandant de l’accueillir comme sa mère (Jean 19, 34). Marie, en devenant la mère du disciple que Jésus aimait devient la mère de tous les disciples, la mère et le modèle de l’Eglise. Plus fidèle que la plupart des apôtres, elle participe à sa passion autant qu’une mère peut le faire lorsqu’elle voit son fils crucifié. La mort de son fils a été comme «une épée qui a transpercé son âme» (Luc 2, 26-27). Pourtant, elle n’a pas perdu l’espérance. Non seulement, elle a accueilli son fils lors de sa conception, mais elle l’accueille encore lors de la descente de la croix que tant d’œuvres d’art ont reproduite sous la forme de la piéta.
- Elle reçoit, une nouvelle fois, l’Esprit Saint pour l’annonce de l’Evangile. On la retrouve après la résurrection, avec les apôtres, fidèle dans la prière (Actes des Apôtres 1, 14). Au moment de la Pentecôte, elle est présente à la naissance de l’Eglise.
Les Écritures évoquent encore plusieurs fois la Mère du Seigneur, mais nous avons là les étapes essentielles. Ces étapes qui viennent d’être trop brièvement rappelées constituent la plénitude de la vie chrétienne. Si, comme Marie, tous les baptisés se laissaient habiter par la même confiance en Jésus, et le même désir de le faire connaître, l’Eglise serait certainement plus vivante
Voici pourquoi nous pouvons fréquenter Marie, dans les Écritures tout d’abord mais aussi dans la prière.
Marie, modèle d’humilité, nous conduit à Dieu
La Vierge Marie a pu faire un tel parcours parce qu’elle a été soutenue par la grâce de Dieu. Elle le reconnaît bien volontiers en disant à sa cousine «que tous les âges la diront bienheureuse». Mais si cela a été possible, c’est parce qu’elle a toujours vécue en « humble servante ». Humble, parce que servante ! L’humilité est le lieu par excellence de la sainteté de Marie. Chacun le sait, servir une fois, tout le monde sait le faire. Mais servir sans cesse suppose une vraie pauvreté du cœur. Et l’écrin que Dieu a choisi pour la venue de son Fils au milieu de nous est le cœur d’une humble servante.
C’est un modèle accessible à tous, et révolutionnaire à la fois. Il nous provoque à relire notre vie et à considérer chacune de nos activités sous l’angle du service. Même la responsabilité d’une entreprise, d’une administration, d’une équipe ou d’une famille peut être abordée sous l’angle du service !
Pour conclure, je voudrais rappeler une expression de Saint Louis-Marie Grignon de Montfort qui m’a toujours éclairé : «Marie n’est pas un détour pour rejoindre le Christ, elle est un raccourci».
Mgr Bruno Feillet, évêque auxiliaire du diocèse de Reims.
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